Budget prévisionnel 2023 : comment tenir compte de la crise énergétique ?

Une bonne partie des entreprises dont les contrats d’énergie devaient être renouvelés en 2023 ne l’ont pas encore renouvelé. Certaines ont fait le choix d’acheter sur le marché spots et ne sont pas encore couvertes pour 2023. Dans un tel contexte d’instabilité et d’incertitude, comment les directions financières de ces entreprises établissent-elles leurs prévisions pour 2023 ?

Un impact et des conséquences inévitables pour toutes les entreprises

Budget prévisionnel 2023 : l’augmentation des prix de l’énergie

Sans avoir toutes les cartes en main, notamment celle cruciale de l’énergie, Xavier Cruchet a dû établir son budget prévisionnel 2023. En effet, le directeur financier d’Ingredia doit faire face à de nombreuses incertitudes sur la question énergétique. Si le sujet n’étais pas un enjeu stratégique auparavant il est devenu l’une des préoccupations principales de l’entreprise. Les impacts de l’énergie sur les coûts de production sont, en effet, devenus si importants « que nous devions mener une vraie stratégie de pilotage de cette question et prendre des décisions ». En outre, il souligne que malgré la complexité du sujet, une attention particulière est accordée par les directeurs financiers à la question de l’achat d’énergie.

La coopérative avait dépensé 8 millions d’euros pour le gaz, l’électricité et la chaudière à biomasse en 2021. Et 16 millions d’euros en 2022. Pour 2023, Xavier Cruchet prévoit 33 millions d’euros dans la case « énergie » de son tableau budgétaire. Cela représente environ 8 % du chiffre d’affaires de la société.

Une situation difficilement contrôlable

La société utilise une combinaison d’achats spot et de contrats Arenh pour acheter son électricité. Ainsi, le contrat Arenh doit couvrir environ 60% de la consommation de l’entreprise en 2023. En outre, l’entreprise n’attendra pas une éventuelle baisse du marché pour acquérir le reste de son électricité pour 2023. De ce fait, elle préfère acheter dès lors le reste de ses besoins aux tarifs actuels afin de pouvoir annoncer des prix de vente à ses clients pour au moins le premier semestre. En prenant cette décision, la coopérative entend éviter « la mauvaise expérience de l’année dernière ».

Quel prix réel pour les entreprises ?

À plus petite échelle, Gregory Piegay, responsable administratif et financier de Sève, une chocolaterie-pâtisserie lyonnaise, jongle avec son prochain budget. L’entreprise a une dizaine de contrats de fourniture d’énergie. Deux d’entre eux sont critiques et arriveront à échéance au milieu de l’année 2023. La PME craint les conséquences d’une erreur si elle recourt à un fournisseur alternatif.

Résultat, Grégoire Piegay préfère surévaluer son budget énergétique pour 2023 à 250 000 € contre 100 000€ cette année. Un choix pour protéger l’activité. Cependant, un choix ne permettant pas l’investissement dans de nouvelles machines.

Objectif 2023 : anticiper l’achat d’énergie

Emmanuelle Wargon, présidente de la Commission de régulation de l’énergie, a déclaré qu’à la mi-novembre 2022, seule la moitié des entreprises françaises qui avaient des contrats à renouveler pour 2023 l’avaient fait.

Constat partagé par Anthony Dal Moro, PDG de la société de courtage en énergie Alliance des Énergies. Il met fortement en garde contre cette situation. Le spécialiste s’interroge et conseille aux DAF de « prévoir un X4 par rapport à leur dernier contrat. ». Un conseil à associer à la mise en place de contrats techniques avec l’aide d’experts pour les très gros consommateurs d’énergie. Il ajoute, « des contrats complexes, mais permettant une meilleure efficacité économique ».

Franck Duthel, expert en intelligence énergétique commerciale chez Horizon Énergie Conseil, contribue à ce rapport. Les prix ne reviendront pas à ceux d’avant Covid. Il préconise l’anticipation et la veille avec l’aide de professionnels.

Budget prévisionnel 2023 : repenser sa politique budgétaire

Il devient vital pour toutes entreprises de réévaluer sa stratégie budgétaire face à la fluctuation des coûts de l’énergie. C’est en tout cas ce que révèle l’étude annuelle de la DFCG et de PwC sur les objectifs des directions financières en 2023. Cette étude révèle que 82 % des DAFs prévoient de faire évoluer leur approche budgétaire.

Dans cet environnement flou, le président de la DFCG reconnaît de nombreux leviers potentiels pour améliorer leurs prévisions. Tout d’abord, le rolling forecast qui, dans certaines entreprises, autorise une évolution mensuelle et permet d’intégrer de nouvelles variables. La deuxième solution consiste à donner à la direction et aux parties prenantes un éventail de scénarios, du plus négatif au plus positif. L’avantage de choisir cette stratégie est de sensibiliser immédiatement aux risques de la hausse des prix de l’énergie. L’analyse prédictive est le troisième outil cité par cette étude pour modifier leur stratégie budgétaire en fonction de l’incertitude.

Enfin, l’approche conventionnelle : « On refait tout et on recommence le budget lorsque de nouvelles données arrivent ». Une stratégie classique, mais qui prend du temps.

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